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23 décembre 2011 5 23 /12 /décembre /2011 20:08

petit_frere_2011.12.21_xtin.jpg

" L'arrivée du petit frère "
acrylique sur toile (27cm x 22cm)

 

 

Quand il est arrivé: coup de massue, je n'étais plus l'unique, mon nombril a commencé à me faire souffrir et c'est remonté jusqu'au coeur, soufflé que mes parents aient pu croire un instant que j'aurais plaisir à accueillir cette larve.

Dès son arrivée, on me l'a collé sur les genoux. Couche merdeuse. Odeur de lait caillé. Regard imbécile posé sur moi. J'avais des lames de rasoir à la place des ongles. Ainsi, il était la chair de leur chair... et tous m'ont dégouté, surtout ma mère: "comme vous vous ressemblez!", "on dirait toi quand tu étais petit". Beurk. J'étais tétanisé.

J'ai changé de place dans la famille, d'enfant, de fils, j'étais devenu "l'ainé" et j'ai dû porter le poids de cette chair informe et gigotante.

D'aimant, j'étais devenu jaloux.

J'allais devoir tracer la route, préparer tous les chemins que ce petit frère allait ensuite emprunter sans conflits.

Il me fallut lui parler, lui sourire, ne pas effrayer cet être fragile. Qui se souciait de ma fragilité à moi, celui auquel on attribuait la lourde tache de préparer? M'avait-on demander mon avis? Qui étais-je devenu?

Il me fallut en passer par les pincements, les morsures, les méchancetés. Il me fallut affronter l'amour immodéré qu'on lui vouait et qu'il m'avait volé.

J'ai été, durant toute leur vie, l'aide de mes parents. Je les ai satisfait du mieux que j'ai pu. J'ai repris la boutique de mon père alors que j'aurais tant aimé devenir pianiste. J'ai appris à lire et à compter. Mon petit frère apprit la musique.

A la fin de leur vie, je suis devenu leur unique soutien financier. J'étais présent et attentif. J'écoutais sans broncher ma mère louer les absences de Benjamin: "Le pauvre, encore en tournée".

Mon aigreur était intense. Ma haine était maladive. Ma déchéance fut mon sauvetage. Benjamin s'est occupé de moi, de mes désintoxications. Benjamin a supporté mes crises. Benjamin m'a placé dans un hopital spécialisé. Benjamin n'était pas là quand papa est mort.

Ajourd'hui, Benjamin est atteint d'artrose déformant. Il ne peut plus jouer de piano, alors il sert la clientèle dans l'ancienne boutique de papa que j'ai reprise à sa disparition. Parfois, je pianote sur les touches mortes du piano droit relégué au grenier. Maman ne sait plus qui nous sommes, elle m'a oublié, elle l'a oublié aussi. Elle passe son temps à tricoter un fil de laine imaginaire.

Quand je les regarde, je me dis: " heureusement, ils m'ont".

 

 

originale ici

 

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